SIMP |
Projet de loi Simplification de la vie économique (1ère lecture) (n° 550 ) |
N° COM-352 24 mai 2024 |
AMENDEMENTprésenté par |
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M. BLEUNVEN, rapporteur ARTICLE 21 |
Supprimer cet article.
Objet
Le critère du « bilan carbone » a été introduit par les rapporteurs pour la commission des affaires économiques du Sénat, Daniel Gremillet, pour l’électricité et le gaz renouvelables, dans la loi « Energie-Climat », du 8 novembre 2019, et Patrick Chauvet, pour l’hydrogène renouvelable, dans la loi « Aper », du 10 mars 2023.
C’est donc un dispositif soutenu de manière constante par la majorité sénatoriale. Son introduction en 2019, et son extension en 2023, ont d’ailleurs reçu l’appui de l’Assemblée nationale et des ministres chargés de l’énergie de l’époque.
Le revirement de position du Gouvernement sur ce sujet est incompréhensible : il ne participe pas de la stabilité des règles édictées, ni de la confiance dans les engagements pris.
Dans un rapport remis cette année au Sénat, le Gouvernement a même envisagé son extension aux dispositifs de soutiens publics des projets d’hydroélectricité attribués par guichets d’offres : « l’introduction d’un critère carbone pourrait en revanche être pertinente dans le cas des guichets ouverts pour l’hydroélectricité. »
En second lieu, le dispositif du « bilan carbone » s’applique aujourd’hui uniformément aux projets d’électricité, de gaz et d’hydrogène renouvelables.
Actuellement, les articles L. 331-A du code de l’énergie, pour l’électricité, L. 446-1 du même code pour le gaz, et 812-3 du même code, pour l’hydrogène, offrent donc un cadre législatif complet, intelligible et prévisible.
Ils permettent de ne pas induire de distorsions de concurrence, et donc de garantir une neutralité technologique, entre les différentes filières engagées dans la transition énergétique.
En troisième lieu, le doublon avancé entre le « bilan carbone » national et les critères de durabilité européens n’est pas avéré.
En préambule, les deux dispositifs co-existent sans difficulté depuis plusieurs années : en effet, le critère du « bilan carbone » a été introduit en 2019, tandis que les critères de durabilité ont été introduits en 2021.
D’une part, les deux dispositifs n’ont pas le même champ. Le premier s’applique à tous les projets de biogaz injecté soutenus par appels d’offres. Le second s’applique aux projets de biogaz utilisé dans des installations d’électricité ou de chaleur supérieures à 2 mégawatts (MW) ou injecté ou pouvant l’être dans des installations supérieures à 19,5 gigawatt-heures (GWh).
D’autre part, les deux dispositifs n’ont pas le même objet. Le premier est un critère de sélection des offres bénéficiant d’un soutien public, dans le cadre d’une procédure de mise en concurrence. En tenant compte des émissions de ces projets, il permet de garantir que l’ensemble des projets sont performants sur le plan des émissions mais aussi que les projets nationaux ou européens ne soient pas désavantagés par rapport à ceux étrangers. Le second est uniquement un critère de durabilité, qui garantit que le biogaz produit et commercialisé est bien de nature bas-carbone.
L’objectif du « bilan carbone » a bien été rappelé, dès son introduction dans la loi « Energie-Climat », du 8 novembre 2019, dans le rapport législatif du Sénat : « Un tel principe permettra : – d’admettre au guichet ouvert ou de sélectionner dans le cadre d’un appel d’offres les projets les plus performants sur le plan des émissions de gaz à effet de serre ; – indirectement, de soutenir les filières françaises et européennes et ainsi de contribuer au développement d’une industrie verte en France et en Europe. »
Au reste, dans une réponse écrite au Sénat, de décembre dernier, Gouvernement avait indiqué, s’agissant de l’hydrogène renouvelable, que l’évolution du critère du « bilan carbone » national pour tenir compte des critères de durabilité européen était inutile : « Cela est inutile puisqu’il ne s’agit pas d’un critère de durabilité mais bien d’une manière de départager des offres dans le cadre d’un appel d’offre national pour soutenir la production. »
En dernier lieu, l’abrogation du « bilan carbone » n’aurait sans doute pas les effets simplificateurs avancés.
Puisqu’il s’agit d’un critère de sélection des appels d’offres, le critère du « bilan carbone » ne constitue pas, à proprement parler, une formalité administrative pesant sur les porteurs de projets.
Au demeurant, l’étude d’impact annexée au présent projet de loi indique, s’agissant de l’article proposé : « son impact est nul sur les installations de biogaz, qui mettent déjà en œuvre le critère du bilan carbone et les critères de durabilité ».
De plus, le critère du « bilan carbone » autorise aujourd’hui la mise en œuvre d’une bonification pour les projets de biogaz soutenus par appels d’offres : ce bonus financier serait abrogé, en même temps que le critère lui-même, par l’article proposé.
Enfin, étant donné que le gaz bas-carbone a été introduit, aux côtés du gaz renouvelable, notamment dans le cadre du droit à l’injection, par la loi « Aper », du 10 mars 2023, le critère du « bilan carbone » a une évidente raison d’être actuelle : valoriser les petits projets de gaz renouvelable, issus de la méthanisation agricole, face aux plus grands projets de gaz bas-carbone, davantage industriels.