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commission des lois

Projet de loi

Différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification

(1ère lecture)

(n° 588 rect. , 719, 720, 721)

N° COM-31

17 juin 2021


 

AMENDEMENT

présenté par

Irrecevable art. 45, al. 1 C (cavalier)

Mme ESPAGNAC


ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS ARTICLE 41


Après l'article 41

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

"Dans le cadre des conventions entre l’État et les collectivités territoriales mentionnées à l’article L312-10 du code de l’éducation, il est proposé à titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la publication du décret prévu à l’alinéa suivant, de mettre en œuvre un au sein des établissements publics d’enseignement un enseignement bilingue renforcé ayant pour objet d’assurer une bonne maîtrise de la langue française et de la langue régionale par les élèves suivant un enseignement facultatif en langues régionales. Cette modalité d’enseignement revêt, dans le cadre de l’expérimentation, un caractère facultatif pour les élèves et les enseignants. Il exclut également l’usage de la langue régionale dans la vie de l’établissement et garantit l’usage du français de manière quotidienne durant le temps scolaire.

Un décret en Conseil d’État détermine les conditions de l’expérimentation, en prévoyant notamment les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales parties aux conventions avec l’État mentionnées dans l’article L312-10 du code de l’éducation peuvent se porter candidat à l’expérimentation et la procédure à suivre afin de retenir les candidats à l’expérimentation. Il prévoit également les modalités d’évaluation de cet enseignement au regard des objectifs pédagogiques assignés par le premier alinéa.

Les conventions mentionnées au premier alinéa prévoient, quant à elles, sous réserve de la participation à l’expérimentation des collectivités territoriales qui y sont parties, les modalités précises que revêt cet enseignement bilingue renforcé en ce qui concerne le partage horaire des enseignements en langue régionale et en langue française qui peut aller au-delà de la parité horaire, ainsi que les différents cycles d’apprentissage dans lesquels cette expérimentation est organisée. Elles incluent également les modalités pratiques permettant de garantir le caractère facultatif de l’enseignement expérimenté pour les élèves et les enseignants."

Objet

La censure par le Conseil constitutionnel dans sa décision 2021-818 DC du 21 mai 2021 de l’article 6 de la loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion a entraîné l’inconstitutionnalité de l’intégration au sein des programmes de l’enseignement public de la modalité de l’enseignement immersif en langue régionale.

Cette censure fragilise les expérimentations menées dans plusieurs territoires d’un enseignement immersif en langue régionale, selon différentes modalités, dans plusieurs établissements d’enseignement public et privés confessionnels. À la rentrée 2020-2021, 20 établissements publics du Pays basque menaient ces expérimentations au sein de l’école maternelle.

L’amendement proposé vise à expérimenter une nouvelle modalité pédagogique d’enseignement bilingue permettant de renforcer au-delà de la parité horaire l’enseignement dispensé en langue régionale, afin de répondre à un besoin pédagogique d’une meilleure acquisition dès le plus jeune âge de la langue régionale exprimé par les acteurs de l’enseignement public et privé confessionnel, ainsi que par les collectivités territoriales. Cette modalité permet également de renforcer l’acquisition simultanée du français par les élèves.

Le choix du mécanisme expérimental permettra de réaliser des évaluations pédagogiques permettant d’appréhender scientifiquement et objectivement le bénéfice de cette nouvelle modalité d’enseignement sur l’acquisition de la langue régionale et du français. Il permettra également de mieux prendre en compte les besoins spécifiques des différents territoires et d’adapter l’action publique aux besoins de chaque territoire.

L’amendement prend en compte les réserves exprimées par le Conseil constitutionnel dans sa décision précitée, puisqu’il intègre toute une série de garanties qui devront encadrer la définition de cette nouvelle modalité d’enseignement. Cette expérimentation devra, ainsi, garantir le caractère facultatif de cet enseignement à la fois pour les élèves et les enseignants. Le français restera également la langue de communication de l’établissement. Enfin, cette modalité d’enseignement bilingue renforcé devra garantir un usage quotidien du français durant le temps scolaire.

Enfin, l’amendement proposé vise à renforcer la collaboration entre l’État et les collectivités territoriales dans l’organisation des modalités de l’enseignement en langues régionales. Il affirme et développe la décentralisation en matière de promotion des langues régionales, tout en s’inscrivant dans une collaboration nécessaire entre l’État et ces collectivités pour organiser leur enseignement.

En effet, c’est à l’État qu’incombe la mission de définir les conditions précises de cette expérimentation en adoptant un décret en Conseil d’État. Les collectivités territoriales sont associées à cette expérimentation, puisqu’elles peuvent décliner localement l’expérimentation de cet enseignement bilingue renforcé, dans le respect des conditions fixées par décret, par le biais des conventions passées entre l’État et les collectivités territoriales relatives à l’enseignement des langues régionales. Cette association permet également d’avancer dans la logique de différenciation territoriale, puisque chaque territoire pourra organiser une modalité d’enseignement bilingue renforcé adaptée aux besoins de l’apprentissage de sa langue régionale, en modulant le partage horaire des enseignements en français et en langue régionale, ou les cycles dans lesquels cette expérimentation peut avoir lieu. L’État reste un acteur central de ce mécanisme, puisqu’il est pleinement associé à ce travail d’adaptation territoriale en étant partie aux conventions organisant les modalités d’enseignement facultatif des langues régionales.