commission des finances |
Proposition de loi Fiscalité de la succession et de la donation (1ère lecture) (n° 710 ) |
N° COM-11 rect. 14 octobre 2019 |
AMENDEMENTprésenté par |
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MM. CADIC et JANSSENS ARTICLE 3 |
Rédiger ainsi cet article :
Le code civil est ainsi modifié :
1° Les articles 912 à 930-5 sont abrogés.
2° Après l'article 911, il est inséré un nouvel article 912 ainsi rédigé :
« Art. 912. - La liberté testamentaire est un droit inviolable et absolu qui parachève le droit de propriété. Le défunt peut librement disposer de son patrimoine par donation ou par testament. »
Objet
Cet amendement propose, non plus seulement de réformer et d'assouplir la réserve héréditaire, comme le prévoit l'article 3 initial de la présente proposition de loi, mais de la supprimer.
Il est directement inspiré d'une proposition formulée et étayée par le laboratoire d'idées GenerationLibre dans une note publiée en mars 2019.
En contraignant le défunt à répartir obligatoirement une part de son patrimoine au sein de sa famille, la loi française méconnaît la liberté testamentaire, laquelle est pourtant consubstantielle au droit de propriété protégé par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789.
La réserve héréditaire est contestable à un triple titre.
Elle l'est d'abord sur le plan philosophique. Rien ne justifie que l'Etat s'immisce dans l'intimité des familles et la répartition d'héritages qui ne lui appartiennent pas. Il est incongru qu'il faille, aux termes de la loi, mourir seul et sans descendance directe pour pouvoir disposer librement du patrimoine que l'on a constitué. Or, chacun devrait pouvoir utiliser librement son patrimoine pour servir, à proportion choisie, les causes qu'il chérit.
Elle l'est ensuite sur le plan social. En imposant une transmission linéaire et obligatoire des patrimoines familiaux, la réserve héréditaire est, de fait, devenue un instrument de reproduction favorisant les rentiers à mesure qu'a reculé en France l'âge moyen à l'héritage (près de 50 ans aujourd'hui, contre seulement 30 ans au début du XXe siècle).
Elle l'est enfin sur le plan juridique. La reconnaissance par le droit de l'Union européenne d'un libre choix en matière de législation applicable aux successions (cf. règlement européen relatif à la compétence de la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des actes authentiques en matière de succession du 4 juillet 2012) et l'absence dans d'autres pays de mécanismes analogues à la réserve héréditaire française tendent à isoler et affaiblir cette dernière, privilégiant là encore les plus fortunés, qui peuvent aussi plus facilement s'extirper de la complexité réglementaire nationale au bénéfice de régimes juridiques étrangers plus attractifs.
Certes, en assouplissant l'obligation de transmission à ses ayants droit directs par la révision des quotités disponibles, l'article 3 de la présente proposition de loi atténue opportunément la portée de la réserve héréditaire. Ce faisant, il s'inscrit dans le sillage des précédentes réformes, en particulier celle de la loi du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités.
Le présent amendement permettrait cependant d'aller plus loin, en abrogeant purement et simplement la réserve héréditaire.