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commission des lois

Projet de loi

République numérique

(1ère lecture)

(n° 325 )

N° COM-368

4 avril 2016


 

AMENDEMENT

présenté par

Adopté

M. SIDO

au nom de la commission des affaires économiques


ARTICLE 23 TER


Supprimer cet article.

Objet

L’article 23 ter vise à imposer des contraintes aux gestionnaires de plateformes dédiées à la location d’hébergements de courtes durées.

Les plateformes internet de location saisonnière ont connu un développement rapide mais relativement récent, qui explique que la question de leur statut juridique fasse l’objet de débats non encore tranchés aujourd’hui. D’un côté, le droit communautaire est fréquemment invoqué pour écarter la possibilité d’imposer des obligations de contrôle à la charge des gestionnaires de ces plateformes. De l’autre, les représentants des professionnels du tourisme et des agents immobiliers, subissant cette nouvelle forme de concurrence, demandent que ces plateformes soient soumises aux mêmes règles que celles s’appliquant à l’intermédiation immobilière, ce que contestent les entreprises concernées. En tout état de cause, ces différentes analyses amènent à considérer la disposition de l’article 23 ter du projet de loi, soit comme non conforme au droit communautaire, soit comme prématurée.

Tout d’abord, cette disposition est sans doute contraire au droit communautaire, et plus particulièrement à la directive 2000/31 (« commerce électronique ») : l’article 3, §2 de la directive pose le principe du pays d’origine. Selon cette disposition, « les Etats membres ne peuvent, pour des raisons relevant du domaine coordonné, restreindre la libre circulation des services de la société de l’information en provenance d’un autre Etat membre ». L’article 23 ter constitue une restriction à la LPS qui ne saurait être opposée aux entreprises non établies sur le territoire français (selon la jurisprudence : « s’agissant du domaine coordonné, les États membres doivent assurer que, sous réserve des dérogations autorisées selon les conditions prévues à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2000/31, le prestataire d’un service du commerce électronique n’est pas soumis à des exigences plus strictes que celles prévues par le droit matériel applicable dans l’État membre d’établissement de ce prestataire »).

L’article 23 ter est aussi problématique au regard de la section 4 de la directive relative à la responsabilité des prestataires intermédiaires. Enfin, l’article 15 de la directive prévoit une absence d’obligation générale en matière de surveillance.

Par ailleurs, en droit national, cette disposition se révèle inutile et prématurée, car elle recoupe les dispositions d’autres textes déjà en vigueur.

L’opportunité de cet article 23 ter est en effet étroitement relié à la question de savoir si ces plateformes dédiées à la location saisonnière sont soumises ou non à la loi du 2 janvier 1970 dite « Hoguet », qui réglemente l’accès à l’activité d’intermédiation immobilière. Cette question a vocation à être tranchée par le juge. Or, si celui-ci décidait de soumettre ce type d’activité aux dispositions de la loi « Hoguet », alors l’article 23ter du présent projet de loi deviendrait inutile et superflu : en effet, la loi « Hoguet » fait déjà obligation à tout professionnel de l’immobilier de vérifier soit le titre de propriété du bailleur soit l’autorisation de sous-louer avant de faire signer un mandat de location.

Ainsi, il appert que la disposition portée par l’article 23 ter du présent projet de loi arrive à contretemps, compte tenu des questions juridiques qui ont vocation à être prochainement tranchées concernant le statut de ces plateformes de location saisonnière. L’opportunité d’une telle disposition ne peut pas être appréciée pour le moment, elle ne pourra l’être qu’à l’aune des décisions qu’aura prises le juge sur ces questions.